Comment les centres commerciaux se réinventent avec les loisirs

Autrefois temples de la consommation, les centres commerciaux deviennent de véritables pôles de loisirs et de restauration, où l’expérience client est centrale. Face à la montée du e-commerce et à l’évolution des attentes des consommateurs, ces espaces misent sur la convivialité et l’immersion pour attirer un public toujours plus large. Le développement d’espaces de restauration, de loisirs ou encore de sport transforment l’offre traditionnelle. Mais cette mutation n’est pas sans risques. Entre gestion complexe et obsolescence rapide des tendances, les centres commerciaux doivent de fait sans cesse innover pour rester attractifs.

Les centres commerciaux connaissent une transformation profonde, marquée par une intégration croissante des loisirs et de la restauration dans leur périmètre. Ils évoluent aujourd’hui vers des espaces hybrides où l’expérience client prime sur l’acte d’achat. Cette mutation se traduit par une diversification de l’offre, avec l’essor des food courts, des espaces de jeux, des salles de réalité virtuelle et des infrastructures sportives. Des projets innovants se multiplient, à l’image du centre rénové « Le Spot » à Évry-Courcouronnes, dont la fréquentation a bondi de 15% à 20% après l’arrivée de 20 restaurants et d’espaces de loisirs (parc de jeux, kiosques, etc.) ou encore de l’ouverture de Boom Boom Villette à Paris, un espace entièrement dédié aux loisirs et à la restauration.

Le groupe d'immobilier commercial Unibail-Rodamco-Westfield a de son côté investi dans l’ouverture du parc de réalité virtuelle Illucity aux 4 Temps à La Défense ou de la salle d’arcade La Tête dans les Nuages à Lyon. Ce repositionnement stratégique vise à capter une clientèle en quête d’expériences immersives et de moments de convivialité, tout en stimulant la fréquentation des centres.

L’expérience client au cœur des projets

Cet essor des loisirs et de la restauration dans les centres commerciaux répond à plusieurs tendances de fond. Face à la montée du e-commerce, les consommateurs recherchent désormais des lieux où l’expérience se substitue à la simple transaction. Les enseignes misent ainsi sur la convivialité, l’interactivité et la diversité des services pour prolonger la durée de visite et attirer une clientèle plus large. Par ailleurs, la restauration, qui représente déjà plus de 10% du chiffre d’affaires des centres commerciaux, connaît une croissance soutenue, portée par le dynamisme des franchises et l’apparition de nouveaux concepts culinaires. Le secteur du sport et du divertissement n’est pas en reste, avec la montée en puissance des salles de fitness et l’engouement pour des activités comme le padel ou l’escalade. En misant sur ces segments porteurs, les centres commerciaux se positionnent comme de véritables destinations de loisirs, capables de rivaliser avec d’autres formes de divertissement urbain.

Un risque de dilution de l’identité commerciale

Cependant, cette stratégie comporte des risques. La multiplication des activités annexes pourrait diluer l’identité commerciale de ces espaces, en réduisant la place accordée aux enseignes traditionnelles. La gestion opérationnelle d’un centre mixant commerces, loisirs et restauration requiert par ailleurs une expertise spécifique afin d’assurer la rentabilité et la cohérence de l’offre. D’autant plus que la rapidité d’évolution des tendances expose certains investissements à une obsolescence prématurée, notamment dans le domaine des loisirs. Enfin, le développement intensif de la restauration pourrait conduire à une saturation de l’offre, compromettant la rentabilité des nouveaux projets. Ainsi, si la réinvention des centres commerciaux par les loisirs et la restauration constitue une réponse adaptée aux mutations du commerce, son succès repose sur une gestion fine des équilibres et une capacité d’adaptation continue aux attentes du public.

Directeur d’études au sein du groupe Xerfi depuis plus de quinze ans, Vincent Desruelles analyse les marchés de l’immobilier, du bâtiment et des services. Il décrypte les évolutions du logement, des bureaux, de la rénovation et des nouvelles formes d’hébergement, en examinant la manière dont ces segments s’adaptent aux mutations économiques, réglementaires et sociétales.

Ses travaux portent notamment sur les usages émergents, les transitions environnementales, les recompositions de chaînes de valeur et l’évolution des modèles opérés par les acteurs. En parallèle de ses missions d’étude, il est régulièrement sollicité par la presse écrite et professionnelle pour apporter un éclairage expert sur les dynamiques des marchés immobiliers. Il intervient également dans le cadre de prestations ciblées auprès de groupes de promotion immobilière et d’organismes de logement social, afin d’appuyer leurs réflexions stratégiques ou leurs travaux d’analyse.

En interne, il contribue à structurer la veille sur ses domaines d’expertise et participe à la production de travaux transversaux portant sur le bâtiment, l’ingénierie, l’immobilier tertiaire ou les marchés résidentiels. Il assure en outre un rôle d’encadrement éditorial auprès de nombreuses études.

Diplômé de l’Université Paris-Dauphine et de l’Université Panthéon-Sorbonne, il s’intéresse particulièrement au rôle de l’innovation - numérique, technique ou organisationnelle - comme levier d’adaptation et de renouvellement des modèles immobiliers.