AVIS D'EXPERT | Alix Merle | Publié le 09 Janvier 2023
Services aux ménagesSantéL’offensive des investisseurs privés dans la radiologie s’accélère. Après l’entrée d’Ardian au capital de Simago en juin 2022, suivie du rapprochement entre Résonance Imagerie et Andera Partners, Ardian et Rothschild & Co., Imapôle s’est adossé à Eurazeo en septembre dernier. Dans le détail, le fonds Nov Santé Actions Non Cotées, géré par Eurazeo , a annoncé avec Bpifrance la finalisation d'un investissement de plus de 50 millions d’euros dans le groupe Imapôle. Au passage, le fonds a pris une part minoritaire du capital aux côtés des radiologues associés fondateurs. Fondé en 2018 à la suite de la fusion de trois grandes cliniques de l'Est lyonnais, Imapôle est un groupe d’imagerie médicale doté de 24 machines (dont 4 scanners et 2 IRMs) qui accueille chaque année 170 000 patients.
Le processus de financiarisation observé dans l’imagerie médicale se compare aisément à celui observé dans la biologie médicale et les soins vétérinaires. Tout comme ces deux autres secteurs, l’imagerie médicale présente en effet de nombreuses caractéristiques favorables à l’arrivée des investisseurs : fort potentiel de croissance du marché, rentabilité élevée et stable, offre atomisée avec de nombreuses cibles de rachats, etc.. Du côté de la biologie médicale, ce mouvement, qui s’est amplifié à partir de 2010, arrive désormais à maturité. En une décennie, cette financiarisation a accéléré la consolidation de l’offre autour de grands réseaux. D’après l’Atlas de la biologie médicale privée, publié par Ekipaj, les 12 principaux réseaux de biologie médicale exploitaient ainsi 72% des sites de biologie sur le territoire en 2020.
La réglementation en matière de propriété du capital des sociétés d’exercice d’imagerie médicale est pourtant très stricte. Celle-ci prévoit notamment que les radiologues doivent obligatoirement détenir (directement ou non) la majorité du capital social et des droits de vote d’un cabinet ou d’un centre exploité sous la forme d’une société d’exercice libéral (SEL). Elle limite en outre à 25% l’ouverture du capital de ces dernières à des sociétés de médecins ou à des personnes extérieures à la profession. Enfin, les sociétés d’exercice libéral en imagerie doivent être inscrites au tableau de l’Ordre des médecins pour exercer. Voilà pour la théorie.
En pratique, les investisseurs ont trouvé des montages souvent complexes pour contourner ces obligations et pénétrer le marché des soins d’imagerie médicale. Depuis un décret publié en 2012, des holdings peuvent chapeauter un regroupement de SEL et leur facturer des services communs : gestion administrative, achats, gestion RH, etc. Contrairement aux SEL, elles peuvent par ailleurs être majoritairement détenues par des non-praticiens. Ainsi, les investisseurs non professionnels ont la possibilité de construire des réseaux de centres d’imagerie autour de prises de participations croisées et de holdings.
Une autre solution pour contourner les règles de détention du capital est de dissocier les droits de vote des droits financiers rattachés aux parts ou actions détenues grâce à la création d’actions de préférence. Il est alors possible d’octroyer 75% des droits de vote à des praticiens tout en conservant la quasi-totalité des droits financiers. En pratique, ce type de montage financier reste toutefois soumis aux règles de détention des SEL et peut faire l’objet de sanctions de la part de l’Ordre des médecins en cas de manquement. Enfin, les acteurs financiers peuvent choisir de prendre le contrôle des plateaux techniques d’imagerie et des autres moyens nécessaires au fonctionnement des cabinets et centres d’imagerie (locaux, personnel…) plutôt que des sociétés d’exercice. Ces acquisitions sont réalisées par le biais de structures commerciales (SAS, SARL, SCI, GIE, etc.) non assujettis aux règles de détention du capital des SEL. Dans ce cas, les sociétés à la tête des moyens d’exploitation peuvent facturer des redevances aux praticiens libéraux qui les utilisent pour exercer leur activité.
Perspectives à 2026 et stratégies d’adaptation face aux nouvelles exigences de l’Assurance-maladie
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