AVIS D'EXPERT | Cathy Alegria | Publié le 21 Mars 2022
Services aux ménagesSantéAutrefois, l’entrée en maison de retraite des personnes âgées en perte d’autonomie était souvent un passage obligé. Aujourd’hui, de nouveaux parcours émergent, mêlant maintien à domicile, hébergements intermédiaires (résidences seniors, résidences autonomie…) et séjours plus ou moins longs en EHPAD (établissement d’hébergement pour les personnes âgées dépendantes). La bascule vers le domicile devient donc une réalité de plus en plus tangible. Celle-ci est alimentée par la volonté des Français de vieillir chez eux, la prochaine explosion des plus de 75 ans et l’ambition des pouvoirs publics de privilégier une approche domiciliaire alors que la dépendance coûte chaque année à l’Etat 25 milliards d’euros. Parallèlement à l’essor de l’offre à domicile, la consolidation des métiers du grand âge est en cours. Et un tel décloisonnement pourrait d’ailleurs à terme encourager les acteurs à devenir des « guichets uniques » pour les seniors. A ce petit jeu, les grands groupes d’EHPAD privés semblent les mieux placés. A condition de résoudre les problèmes de maltraitance dans leurs maisons de retraite. Déjà, plusieurs d’entre eux testent les EHPAD « hors les murs ». Malgré ces perspectives encourageantes pour les groupes d’EHPAD privés sur l’ensemble des métiers de la dépendance, les obstacles sont réels pour les autres acteurs privés. Les enseignes et structures indépendantes spécialisées dans le maintien à domicile ainsi que les généralistes des SAP vont ainsi devoir réviser leurs stratégies.
La majorité des acteurs présents sur le marché de la dépendance à domicile sont des structures publiques et privées à but non lucratif. Elles interviennent surtout dans les zones rurales, plus difficiles à couvrir. Concentrés en zones urbaines ou à leur proximité, les opérateurs privés commerciaux sont eux à la tête d’environ 40% des SAAD (service d'aide et d'accompagnement à domicile) mais d’à peine 2% de SSIAD (services de soins infirmiers à domicile), faute d’un modèle économique attractif. Et ils manifestent une grande méfiance envers les SPASAD (services polyvalents d’aide et de soins à domicile). Cette famille d’opérateurs est dominée par des généralistes de la dépendance (Orpea, Korian, DomusVi et Colisée), détenteurs de réseaux de plusieurs dizaines voire centaines d’agences (Petit-fils, Adhap,…), et compte également des généralistes des services à la personne (Oui Care ou Zephyr) ou des spécialistes de l’aide aux personnes âgées. Les problèmes de recrutement, fidélisation et absentéisme de la main d’œuvre sont récurrents dans le secteur, bridant la croissance du marché. Pour limiter le turn over, les acteurs du domicile doivent revaloriser les métiers, socialement et financièrement.
Soutenue par l’explosion du nombre de personnes âgées en perte d’autonomie et la volonté des pouvoirs publics de favoriser leur maintien à domicile le plus longtemps possible, l’activité des acteurs a mécaniquement rebondi en 2021. A la suite de ce rebond, leurs marges ont retrouvé un niveau proche de celui d’avant crise même si elles restent fragilisées par le poids des frais de personnel. Si les revenus des SSIAD sont structurellement alimentés par la recrudescence des cas de dépendance lourde entraînant une complexification des soins, ces structures ne réussissent pas à équilibrer leurs comptes en raison d’un mode de tarification ne couvrant pas leurs frais de fonctionnement. Pour leur verser un complément de financement qui leur permet d’assurer des passages au domicile plus réguliers, d’étendre les horaires et de faciliter les sorties d’hospitalisation, la création de places de SSIAD renforcées a été étendue à l’ensemble des ARS en 2021.
A moyen terme, l’activité des acteurs du domicile restera bien orientée en raison de la croissance inéluctable du nombre de seniors dépendants (3,7 millions en 2040, soit un million de plus qu’en 2020) et le virage domiciliaire souhaité par les pouvoirs publics. En l’absence de la réforme « grand âge et dépendance » (celle-ci a été maintes fois reportée), l’instauration d’un tarif plancher horaire de 22 euros pour tous les SAAD, la refonte de la tarification des SSIAD et le regroupement des structures dans des services uniques (les services autonomie à domicile ou SAD) devraient donner une nouvelle impulsion à l’activité.
Alors que les pouvoirs publics prévoient de publier un décret au plus tard en juin 2023 sur les futurs SAD, l’année 2024 sera probablement celle d’une réorganisation massive des services à domicile avec la disparition progressive des SAAD et des SSIAD dans leur configuration actuelle. Ces futurs guichets territoriaux devraient en effet réorganiser l’offre à domicile de demain autour de structures proches des SPASAD intégrés actuellement.
Dans ce contexte, le chiffre d’affaires des SAAD commerciaux du panel Xerfi devrait augmenter de 15% en 2022, année au cours de laquelle les mesures tarifaires joueront à plein. Une évolution de l’ordre de 7% par an en moyenne suivra en 2023 et 2024, années au cours desquelles l’activité profitera de la hausse des demandes de prise en charge, selon les prévisions des experts de Xerfi Precepta.
Le bond du chiffre d’affaires des SAAD privés en 2022 ne sera pourtant pas forcément synonyme de marges supplémentaires. Ces structures vont en effet devoir consacrer une large part de leurs rentrées additionnelles à l’alignement des salaires de leurs équipes sur ceux du secteur associatif pour rendre les métiers plus attractifs. Pour mémoire, les rémunérations des personnels du monde associatif ont été revalorisées de 13% à 15% en octobre 2021 grâce à des financements publics, encourageant au passage les départs du privé et donc les difficultés de recrutement. Les dépenses de l’assurance maladie au titre des SSIAD devraient elles s’apprécier de 3% en 2022 puis de 10% à 2,2 milliards d’euros sous l’effet de la nouvelle tarification, prévoient les experts de Xerfi Precepta.
Si les dépenses liées à la perte d’autonomie sont conséquentes, le coût de la prise en charge d’un senior dépendant à domicile est bien plus faible qu’en établissement. C’est également le cas pour le reste à charge médian qui passe alors à 80 euros, contre 500 euros en résidence autonomie, 700 à 1 600 euros en résidence service et 2 000 euros en EHPAD.
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